Arnaques téléphoniques en Ukraine : comment les fraudeurs escroquent votre argent
Théophane Villedieu
Selon Eurojust, les forces de l’ordre de plusieurs pays européens ont arrêté douze personnes soupçonnées d’être impliquées dans des arnaques téléphoniques à travers l’Europe. Les escrocs utilisent diverses méthodes pour tromper leurs victimes, comme se faire passer pour des policiers pour retirer de l’argent avec les cartes et les coordonnées bancaires des victimes, ou prétendre que leurs comptes bancaires ont été piratés. Ces arnaques téléphoniques en Ukraine représentent une menace croissante pour la sécurité financière des citoyens européens.
Les méthodes des escrocs : usurpation et manipulation
Les fraudeurs derrière ces arnaques téléphoniques en Ukraine ont mis au point des techniques de manipulation sophistiquées pour convaincre leurs victimes de transférer des sommes importantes. L’une des méthodes les plus courantes consiste à se faire passer pour des agents de police ou des employés de banques, utilisant souvent de faux documents officiels pour renforcer leur crédibilité.
« Les fraudeurs convainquaient leurs victimes de transférer d’importantes sommes d’argent de leurs comptes bancaires ‘compromis’ vers des comptes ‘sécurisés’ contrôlés par le réseau », explique l’Agence de coopération judiciaire pénale de l’UE.
Une autre tactique répandue consiste à faire croire aux victimes que leur compte bancaire a été piraté. Les escrocs exploitent alors la peur et l’urgence pour pousser les victimes à agir rapidement, souvent sans prendre le temps de vérifier l’authenticité de l’appel. Dans de nombreux cas, les victimes étaient incitées à télécharger un logiciel d’accès à distance, ce qui permettait aux criminels de prendre le contrôle complet de leurs comptes bancaires.
Usurpation d’identité policière
L’usurpation d’identité policière est particulièrement efficace car elle exploite la confiance que les citoyens accordent aux forces de l’ordre. Les escrocs se présentent comme des enquêteurs travaillant sur une affaire de blanchiment d’argent ou de fraude, demandant aux victimes de coopérer en transférant temporairement leurs fonds vers un compte “sécurisé”.
Dans la pratique, ces appels commencent généralement par une notification d’urgence, créant un climat d’anxiété qui empêche la victime de réfléchir objectivement. Les fraudeurs utilisent souvent des terminologies professionnelles et des références à des procédures policières pour paraître authentiques. Une fois que la victime est convaincue, les escrocs la guident pas à pas pour effectuer les transferts d’argent.
Le piège du piratage de compte
Une autre méthode courante consiste à alarmer les victimes en affirmant que leur compte bancaire a été piraté et que des transactions frauduleuses ont été détectées. Les fraudeurs prétendent alors que pour sécuriser les fonds, il est nécessaire de les transférer immédiatement vers un autre compte.
Néanmoins, ces affirmations sont le prétexte parfait pour soutirer de l’argent aux victimes paniquées. Les escrocs fournissent souvent des coordonnées bancaires appartenant à leurs complices, ce qui permet de dissimuler l’origine des fonds. Dans certains cas, ils demandent même aux victimes de se rendre en personne à leur banque pour effectuer les transferts, augmentant ainsi le sentiment d’urgence et légitimant l’opération.
Logiciels d’accès à distance
L’une des méthodes les plus dangereuses des arnaques téléphoniques en Ukraine incite les victimes à installer des logiciels d’accès à distance sur leurs appareils. Sous prétexte de vérifier leur sécurité ou d’effectuer une correction urgente, les escrocs convainquent les victimes de télécharger des applications malveillantes.
Une fois installé, ce logiciel permet aux criminels d’accéder à distance à l’ordinateur, au smartphone ou à la tablette de la victime. Ils peuvent alors visualiser les frappes de clavier, capturer les mots de passe, et même prendre le contrôle direct des appareils. Cette technique est particulièrement efficace car elle donne un accès complet aux informations personnelles et bancaires de la victime, y compris aux codes de confirmation envoyés par SMS.
L’organisation criminelle : recrutement et fonctionnement
Derrière ces arnaques téléphoniques en Ukraine se cache une organisation criminelle structurée avec une hiérarchie claire et des rôles bien définis. Le réseau recrutait activement des personnes dans plusieurs pays européens, notamment en République tchèque, en Lettonie, en Lituanie et dans d’autres nations, pour les amener dans leurs centres d’appel situés à Dnipro, Ivano-Frankivsk et Kiev.
Recrutement européen
L’organisation exploitait les différentes économies européennes en recrutant des individus dans des régions où les opportunités d’emploi étaient limitées. En offrant des salaires attractifs et la promesse d’un avenir meilleur, les chef d’orchestra du réseau parvenaient à attirer de nombreuses personnes, souvent sans antécédents criminels connus.
« Les membres du groupe criminel avaient des rôles différents dans l’organisation, allant des appels téléphoniques à la falsification de certificats officiels de la police et des banques, en passant par la collecte d’espèces auprès des victimes », a noté Eurojust.
Une enquête a révélé que près de 100 personnes de différents pays européens travaillaient dans ces centres d’appel, démontrant l’ampleur de l’opération. Ces centres étaient probablement choisis pour leur emplacement géographique, offrant à la fois une main-d’œuvre bon marché et une certaine distance par rapport aux victimes européennes.
Structure organisationnelle
L’organisation fonctionnait selon une structure pyramidale bien définie. Au sommet se trouvaient les chefs du réseau, responsables de la planification stratégique, du recrutement et de la logistique. Ensuite venaient les superviseurs de centres d’appel, chargés de gérer les opérations quotidiennes et de former les nouveaux employés.
À la base se trouvaient les opérateurs téléphoniques, ceux qui avaient un contact direct avec les victimes. Ces opérateurs suivaient des scripts détaillés et étaient formés pour répondre aux objections et manipuler psychologiquement leurs interlocuteurs. En parallèle, d’autres membres du réseau étaient spécialisés dans la falsification de documents, la collecte d’argent, le blanchiment de fonds et la fourniture d’infrastructures techniques.
Incitations financières
Pour motiver leurs opérateurs, l’organisation offrait des incitations financières substantielles. Les escrocs qui travaillaient directement avec les victimes touchaient jusqu’à 7% de l’argent qu’ils parvenaient à dérober. De plus, ils étaient promis une voiture ou un appartement à Kiev s’ils réussissaient à tromper des victimes pour qu’elles leur cèdent des sommes supérieures à 100 000 euros.
« Ils ont apparemment échoué sur ce dernier point », note-t-on dans le rapport d’enquête.
Cependant, malgré cet échec relatif, l’organisation parvenait à voler plus de 10 millions d’euros auprès de plus de 400 victimes connues. Ces chiffres ne représentent probablement qu’une fraction des dommages réels, car de nombreuses victimes hésitent à signaler ces arnaques par honte ou méfiance envers les autorités.
L’impact des arnaques : chiffres alarmants
Les arnaques téléphoniques en Ukraine ont eu un impact financier et psychologique considérable sur leurs victimes. Le vol de plus de 10 millions d’euros auprès de plus de 400 victimes connues représente seulement la partie visible de l’iceberg. Derrière ces chiffres se cachent des histoires personnelles dévastatrices et des conséquences à long terme qui dépassent largement la simple perte financière.
Conséquences financières
Pour de nombreuses victimes, ces arnaques ont des répercussions financières dramatiques. Bien que les montants volés varient d’une victime à l’autre, certains cas concernent des sommes substantielles pouvant représenter des années d’épargne. Dans un contexte économique difficile, ces pertes peuvent avoir des effets dévastateurs sur la stabilité financière des familles et des individus.
En outre, même lorsque les victimes parviennent à récupérer une partie de leurs fonds, le processus est long et complexe. Les banques mettent souvent du temps à traiter les réclamations, et les procédures judiciaires internationuelles ajoutent des retards supplémentaires. Entre-temps, les victimes doivent faire face à des difficultés financières immédiates, allant jusqu’à l’endettement ou à la perte de leur logement.
Impact psychologique
Au-delà des conséquences financières, les arnaques téléphoniques en Ukraine laissent des cicatrices psychologiques profondes. Les victimes se sentent souvent humiliées,愚弄 (dupées) et responsables de ce qui leur est arrivé. Ce sentiment de culpabilité peut entraîner des troubles anxieux, dépressifs et même des troubles de stress post-traumatique.
« J’ai cru que c’était la police qui m’appelait, j’ai fait exactement ce qu’ils m’ont dit. Maintenant, je n’ose plus décrocher le téléphone », témoigne une victime anonyme.
De nombreuses victimes rapportent également une perte de confiance généralisée, non seulement envers les institutions, mais aussi envers leur propre jugement. Cette méfiance peut affecter leurs relations personnelles et professionnelles, créant un isolement social supplémentaire. Pour les personnes vulnérables, comme les personnes âgées ou isolées, ces arnaques peuvent avoir des conséquences particulièrement graves.
Impact sur la confiance dans les institutions
Ces arnaques sapent également la confiance des citoyens envers les institutions légitimes. Lorsque des criminels se font passer pour des policiers ou des employés de banques, ils exploitent et dégradent l’autorité de ces institutions. Pour les victimes, cette expérience peut rendre plus difficile de faire confiance aux vrais représentants de l’ordre ou aux institutions financières dans le futur.
En outre, ces arnaques compliquent le travail des forces de l’ordre et des banques légitimes. Chaque cas d’arnaque nécessite des ressources d’enquête précieuses, et la méfiance accrue des citoyens peut ralentir les communications officielles et les alertes de sécurité légitimes. Cela crée un cercle vicieux où les criminels continuent de prospérer grâce à la confusion qu’ils créent.
L’action policière : répression internationale
Face à l’ampleur de ces arnaques téléphoniques en Ukraine, une action policière coordonnée a été menée le 9 décembre 2025. Cette opération internationale, menée avec le soutien d’Eurojust, a impliqué les autorités ukrainiennes, tchèques, lettonnes et lituaniennes dans une série de perquisitions coordonnées à travers plusieurs villes ukrainiennes.
L’opération du 9 décembre 2025
Les forces de l’ordre ont mené 72 perquisitions dans trois villes ukrainiennes : Dnipro, Ivano-Frankivsk et Kiev. Ces opérations visaient des bureaux, des résidences et des véhicules associés au réseau criminel. L’échelle de l’opération illustre la complexité et l’ampleur de l’enquête menée durant plusieurs mois.
« Avec le soutien d’Eurojust, les autorités policiques de l’Ukraine, de la République tchèque, de Lettonie et de Lituanie ont exécuté 72 perquisitions dans trois villes d’Ukraine le 9 décembre 2025 », a déclaré Eurojust.
Ces perquisitions ont permis de découvrir et de saisir une quantité importante de preuves matérielles, y compris des documents, des équipements électroniques et des armes. Bien que 45 suspects aient été identifiés lors de l’enquête, seuls douze ont été arrêtés lors des perquisitions, indiquant probablement que certains membres du réseau ont réussi à s’échapper ou à se cacher.
Preuves saisies
<arg_value>Les perquisitions ont permis de découvrir une variété d’éléments compromettant pour le réseau criminel. Les forces de l’ordre ont saisi de faux documents d’identité de policiers et d’employés de banques, utilisés pour donner une apparence légitime aux escroques. Ces documents étaient souvent de très bonne qualité, indiquant la présence de professionnels expérimentés dans le réseau.
En outre, une grande quantité d’équipements électroniques a été confisquée, dont des ordinateurs, des ordinateurs portables, des disques durs et des téléphones portables. Ces appareils contenaient probablement des listes de victimes, des scripts d’appels, des informations bancaires et des communications internes. La saisie de ces données est cruciale pour identifier d’autres membres du réseau et potentiellement d’autres victimes.
Une polygrafe a également été découverte, suggérant que l’organisation utilisait des techniques de détection de mensonges pour évaluer la fiabilité de nouveaux recrues ou pour former ses opérateurs. Cette découverte soulève des questions éthiques et légales sur l’utilisation de tels équipements par une organisation criminelle.
Saisie de liquidités et de véhicules
Les perquisitions ont également permis de saisir des sommes importantes en espèces, indiquant que le réseau avait accumulé des liquidités considérables grâce à ses activités frauduleuses. Ces fonds étaient probablement destinés au blanchiment ou à la répartition entre les membres du réseau.
Vingt-et-un véhicules ont également été saisis, allant probablement des voitures de luxe utilisées par les dirigeants du réseau aux véhicules plus modestes utilisés pour les déplacements quotidiens. Ces véhicules pouvaient servir à des fins de surveillance, de transport de personnel ou de dissimulation d’activités criminelles.
Armes et munitions
La découverte d’armes et de munitions lors des perquisitions indique que le réseau criminel était non seulement impliqué dans la fraude financière, mais aussi dans des activités potentiellement violentes. La présence d’armes suggère que les membres du réseau étaient prêts à utiliser la force pour protéger leurs opérations ou pour éviter d’être arrêtés.
Cette découverte soulève des préoccupations importantes concernant la sécurité des victimes et du personnel d’enquête. Elle indique également que l’organisation criminelle avait des liens plus larges avec d’autres activités illicites, ce qui complique davantage les efforts de répression et de poursuites judiciaires.
Se protéger des arnaques téléphoniques : recommandations pratiques
Face à la montée des arnaques téléphoniques en Ukraine, il est essentiel que les citoyens européens prennent des mesures pour se protéger et protéger leurs proches. La prévention reste la meilleure défense contre ces fraudes sophistiquées qui exploitent à la fois la technologie et la psychologie humaine.
Signes d’alerte à reconnaître
Les arnaques téléphoniques suivent souvent des schémas similaires que les citoyens peuvent apprendre à reconnaître. L’un des principaux signes d’alerte est la demande d’urgence ou de confidentialité. Les escroques créent souvent un sentiment d’urgence pour empêcher les victimes de réfléchir ou de vérifier les informations.
Un autre signal d’alarme est la demande d’informations personnelles ou bancaires. Aucune institution légitime ne vous demandera jamais vos coordonnées bancaires, vos codes de sécurité ou vos mots de passe par téléphone. De même, toute demande de transfert d’argent vers un “compte sécurisé” devrait immédiatement alerter.
En outre, soyez méfiant envers les appels provenant de numéros inconnus ou étrangers, surtout s’ils vous informent d’un problème avec votre compte bancaire ou une procédure légale. Les escroques utilisent souvent la technologie pour masquer leurs vrais numéros ou pour faire apparaître des numéros locaux afin d’augmenter leurs chances que vous répondiez.
Étapes à suivre si vous êtes victime
Si vous pensez avoir été victime d’une arnaque téléphonique, il est crucial d’agir rapidement pour minimiser les dommages. La première étape consiste à contacter immédiatement votre banque pour signaler la fraude et potentiellement bloquer les transactions suspectes. La rapidité d’action est essentielle pour récupérer les fonds.
Ensuite, signalez l’arnaque aux autorités locales. Dans la plupart des pays européens, il existe des plateformes dédiées pour signaler les fraudes en ligne et téléphoniques. Ces signalements aident les enquêteurs à identifier les tendances et à poursuivre les criminels.
« Chaque signalement compte, même si vous pensez avoir perdu peu d’argent. Ces informations nous aident à comprendre les schémas des criminels et à protéger d’autres potentiels victimes », explique un enquêteur spécialisé dans la cybercriminalité.
Enfin, prenez soin de votre santé mentale. Être victime d’une arnaque peut être une expérience traumatisante. N’hésitez pas à demander de l’aide à des proches ou à consulter un professionnel si vous ressentez de l’anxiété, de la honte ou d’autres émotions difficiles suite à l’incident.
Mesures de protection
Pour se protéger des arnaques téléphoniques, plusieurs précautions simples peuvent être prises. La plus importante est de ne jamais partager d’informations sensibles par téléphone, surtout si l’appel n’est pas attendu. Vérifiez toujours l’identité de l’appelant en rappelant le numéro officiel de l’institution prétendue.
Envisagez également d’installer une application de filtrage d’appels sur votre téléphone pour bloquer les numéros suspects. De nombreuses applications gratuites offrent cette fonctionnalité et peuvent réduire considérablement le nombre d’appels indésirables que vous recevez.
Enfin, tenez-vous informé des dernières techniques d’arnaque. Les criminels sont constamment à la recherche de nouvelles méthodes pour tromper leurs victimes. Suivre les actualités de sécurité et les conseils des autorités peut vous aider à rester à l’affût des menaces émergentes.
Procédures de signalement
Signaler une arnaque téléphonique est non seulement important pour votre propre cas, mais aussi pour aider à combattre ce phénomène à plus grande échelle. Dans la plupart des pays européens, vous pouvez signaler ces fraudes à la police locale ou à des agences spécialisées comme l’Office central de lutte contre la criminalité financière.
L’Union européenne a également mis en place des plateformes de signalement centralisées, comme le Centre européen de lutte contre la criminalité sur Internet (EC3), qui collecte les informations sur les cybercrimes à travers l’Europe. Ces signalements aident à identifier les réseaux criminels transfrontaliers et à coordonner les actions de répression.
En France, par exemple, la plateforme Pharos permet de signaler les contenus illicites en ligne, y compris les arnaques. De même, la plateforme Signal-Arnaques du gouvernement français offre un moyen facile de signaler les tentatives de fraude et d’obtenir des conseils pour éviter de devenir victime.
Conclusion : rester vigilant face à la cybercriminalité
Les récentes actions policières contre les arnaques téléphoniques en Ukraine illustrent l’ampleur de ce phénomène et l’importance de la coopération internationale pour le combattre. Malgré les succès des autorités, la menace persiste et évolue constamment, nécessitant une vigilance de tous les jours de la part des citoyens.
La protection contre ces arnaques repose sur trois piliers : l’éducation pour reconnaître les techniques des criminels, la rapidité d’action pour limiter les dommages en cas d’arnaque, et la coopération pour signaler ces activités aux autorités. En adoptant ces pratiques, chaque citoyen peut non seulement se protéger, mais aussi contribuer à rendre la communauté entière plus résiliente face à la cybercriminalité.
Face à ces menaces, il est essentiel de se rappeler qu’aucune institution légitime ne demandera jamais d’argent ou d’informations sensibles par téléphone sous la menace ou l’urgence. En conservant un esprit critique et en prenant le temps de vérifier les informations, nous pouvons tous nous prémunir contre ces arnaques téléphoniques en Ukraine et ailleurs.